Incarnant le renouveau du mouvement reggae conscient, le "Reggae Revival", Protoje, leader du groupe charismatique The Indiggnation, a
débarqué en France, lors de sa
tournée européenne pour la sortie de son 3ème album
« Ancient Future", afin de nous offrir un show exceptionnel, le 13 mai dernier au
106 de Rouen, en Normandie.
Les portes s’ouvrent,
les spectateurs investissent la salle, après une courte attente, les spots rouges
s’allument puis, l’ambiance feutrée vient se tamiser.
The indiggnation s’installe au rythme des cris et des sifflets d’un
public euphorique, ils introduisent la venue de la Star tant attendue en jouant
du rocksteady, l’annonce d’une performance faisant référence aux origines de la
musique et de la philosophie reggae. D’où l’oxymore «
Ancient Future », qui propose dans l’album un voyage dans le temps, à travers les
époques,
pour construire l’avenir.
Comme à son habitude,
Protoje arrive sur scène,
plutôt calme voir même nonchalant, il entame
le premier morceau «
Dread », puis poursuit avec
«
I&I », les titres qui l’ont fait connaître sur la scène
internationale, devenus des classiques pour tous les passionnés de Revival.
Après avoir rassemblé toutes les
générations avec ces hits incontournables, le jamaïcain débute enfin la présentation
de « Ancient Future ». Accompagné de ses deux choristes, il amorce
les premières notes, puis, le duo féminin nous offre une ré-exploration transcendante
du morceau «
Sudden Flight ». Le titre avait fait impression, lors de
sa sortie, grâce à la collaboration avec
Sevana
et
Jesse Royal, deux autres chanteurs
emblématiques de cette nouvelle scène.
Il est presque vingt-deux heures
et le
rythme ska de «
Answer to Your Name », retentit dans la salle, embarquant
avec lui la foule sur un « Skank » frénétique, nous nous immergeons
immédiatement dans l’ambiance « british » des 70’s, à l’époque où ce
genre musical venait conquérir l’Europe, tout droit arrivé de Jamaïque.
On reste stupéfaits
devant la capacité du jeune artiste à s’adapter à tous ces différents styles
avec une aisance digne des plus grands. Passant du ska, au dub puis évoluant
vers le hip-hop avec le morceau «
Criminal », produit à partir des samples
de «
A Song » de
Pablo Moses
et "
General" de
Ini Kamoze.
Il
dénonce les injustices et les atrocités perpétuées aux leaders du mouvement
Rastafari, comme l’arrestation de
Leonard Howell en 1930, considéré comme le « premier rasta » . Il évoque aussi
des faits historiques tels que : La visite de l’Empereur d’Éthiopie
Haïlé Sélassié Ier en Jamaïque en 1966, l’assassinat
de
Walter Rodney, militant de la
cause noire et historien, dans les années 80, ou encore les prémices de la
révolution haïtienne menée par un esclave,
Dutty Bookman en 1790.
A travers un message militant, l’auteur invite
à la réflexion en faisant naître la question de leur culpabilité. Le poing en
l’air, l’auditoire reprend en cœur « Who Dem a Criminal… ? »,
littéralement en patois jamaïcain « Qui sont les criminels ? ».
Les tunes de l’album s’enchaînent,
passant par «
Who knows » et «
Bubblin’ ». Après un
interlude de ses musiciens,
Protoje revient sur scène et empoigne un
mégaphone pour interpréter «
Kingston be Wise », issu de son album
« The 8 Year Affair », sorti en 2013. Il conclut sur un message
d’unité et de solidarité, en fixant tous ces visages tournés vers lui,
attentifs prêts à saisir la moindre occasion de montrer leur approbation.
Après des remerciements
interminables, Le groupe quitte le plateau et le public émerveillé, abasourdi,
prend lentement le chemin de la sortie, conquis par la prouesse unique à
laquelle il vient d’assister, bien loin des prestations habituelles.